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Le cercle vicieux
5 novembre 2016

L'innovation du livre

Dans les allées du salon du Livre 2016, rebaptisé pour la première fois cette année Livre Paris, les visiteurs déambulent comme à chaque édition de tables en étagères couvertes et remplis de milliers d’ouvrages. 180?000 amateurs étaient attendus. Pendant les quelques jours de cet événement littéraire, ils ont pu toucher, feuilleter, parfois sentir, les dizaines de milliers d’écrits présentés pour l’occasion. Le livre, voilà un marché de masse. Le loyal héritier de Gutenberg se porte plutôt bien. Dans le monde, il demeure même le premier marché culturel, largement devant la musique, le cinéma ou les jeux vidéo. En 2014, ses ventes mondiales ont généré 125?milliards de dollars de revenus, selon une étude Kurt Salmon sur les filières culturelles et créatives. À titre de comparaison, la musique pèse 3 fois moins. Le livre est aussi la première industrie culturelle de France avec un chiffre d’affaires de 4,06?milliards d’euros en 2015, selon GfK. “Le livre demeure le premier marché culturel, largement devant la musique, le cinéma ou les jeux vidéo” Leader culturel et économique en imprimé broché ou relié, mais nain et produit de niche en numérique. Grand écart paradoxal à l’heure de la révolution digitale. Il est étonnant de constater le succès marginal du livre dans sa version dématérialisée. Au niveau mondial, le secteur présente le taux de digitalisation le plus faible avec à peine 15% du chiffre d’affaires global, contre 50?% pour la musique et 30?% pour la vidéo, selon le cabinet Kurt Salomon. En France, les ventes numériques restent également très marginales?: “inférieure à 2?% pour une majorité d’éditeurs”, selon le dernier baromètre KPMG. Le e-book, terme générique pour designer le livre en format électronique, peine encore et toujours à séduire un large public. Chaque année, Opinionway réalise un baromètre sur ses usages pour le compte de principaux syndicats professionnels du secteur. Sa 6e édition confirme le faible intérêt des Français?: seuls 2 sur 10 ont lu un e-book en 2015. Plus grave?: 74?% d’entre eux déclarent ne pas du tout envisager ce type de lecture?! Une photographie peu ou prou identique à celle de l’an passé. À se demander si le livre numérique a une chance de devenir un jour un produit de masse… Cette faible demande des lecteurs est à mettre en perspective avec une offre et des stratégies numériques d’éditeurs et de libraires pas toujours très lisibles. La filière culturelle du livre et le monde de l’édition ont pourtant embrassé cette révolution depuis de nombreuses années. D’abord en coulisses?: le digital est fortement intégré dans les processus de production. Rédaction, édition ou fabrication, l’informatique et le numérique ont permis de réduire les coûts et les délais, et d’améliorer la productivité comme dans beaucoup d’industries. “Rédaction, édition ou fabrication, l’informatique et le numérique ont permis de réduire les coûts et les délais, et d’améliorer la productivité comme dans beaucoup d’industries” Pour la gestion des catalogues, des stocks ou des bases de données clients, les vendeurs n’ont pas non plus attendu Amazon pour s’informatiser. Côté offre, la filière s’est elle aussi peu à peu structurée. Dans son baromètre 2015, KPMG estime que 62?% des éditeurs en France disposent d’une offre de livres numériques. Toutes les grandes maisons d’éditions dont le chiffre d’affaires dépasse les 20?millions d’euros sont présentes sur ce marché, mais moins de la moitié des plus petites se sont lancées. Joëlle Tubiana, associé KPMG, décrypte les stratégies e-book des éditeurs?: “Le bénéfice numéro?1 est d’atteindre un public différent. L’aspect économique n’est pas primordial, sauf pour la réédition d’anciens ouvrages ou l’édition de livres à faible tirage. Pour les nouveautés en revanche, les économies sur le tirage, le stockage ou la distribution sont moindres, car les éditeurs doivent quand même produire des ouvrages imprimés”. Un avis que partage Alexis Esmenard, le directeur du développement numérique du Groupe Albin Michel?: “Aujourd’hui, nous ne voyons pas le numérique comme des coûts en moins mais plutôt comme des recettes en plus. D’abord sur les grandes ventes, le prix de fabrication n’est plus vraiment un élément différenciant. Ensuite, le progrès technologique de l’imprimerie a permis de réduire considérablement les coûts de stockage. Nous imprimons pour 3 mois, puis nous rééditons s’il le faut. Le temps où nous imprimions un livre pour 1 an – avec une grande prise de risque – est révolu. Il y a beaucoup plus de souplesse et d’initiative”.

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